Dans le texte Heihô zakki de Yamada Heizaemon, celui‐ci écrit que « pour atteindre réellement une compréhension de ce qu’est le combat à mort, il est nécessaire pour les deux combattants de porter un men, les kote et d’autres pièces de protection, et de se forger à travers la confusion rencontrée en s’engageant dans un audacieux et non restreint entraînement ». Ce passage là se réfère à uchikomigeiko, entraînement où l’on frappe réellement avec le shinai, qui fut à l’évidence promu par Heizaemon à la fin de sa vie. Heizaemon mourut en 1716, période qui correspond avec la déclaration de Shimokawa disant que le bôgu était tout sauf « parfait » à ce moment de son histoire.
En plus de tout cela, l’inscription sur la pierre tombale du 3e fils de Yamada Heizaemon, Naganuma Shirozaemon Kunisato (1688‐1767), héritier de la tradition Jikishinkage‐ryû, dit que parmi ses exploits, il y avait ceux d’avoir amélioré le bokutô et le shinai, et d’avoir perfectionné l’armure en y ajoutant une grille en métal pour le men et d’épaisses protections en coton recouvrant les kote. Kunisato hérita de la tradition par son père Heizaemon en 1708 et tous les deux travaillèrent dur, ensemble, afin d’améliorer le bôgu, jusqu’à la mort de Heizaemon.
En ce basant sur ces documents, il ne devrait pas être erroné de conclure que les améliorations du men et des kote utilisés dans les écoles de la lignée de Jikishinkage‐ryû, ainsi que l’addition du dô pour protéger le tronc furent des innovations de Yamada heizaemon et de son fils Naganuma Kunisato, dans les années 1711‐1716 environ.
Le bôgu de Jikishinkageryû
Maintenant que nous avons vu comment a évolué le bôgu dans la tradition de jikishinkage‐ryû, Je porterai mon attention sur son aspect. Ayant dit cela, il faut préciser que, autant que je sache, il n’y a pas de set original de bôgu de Jikishinkage‐ryû qui soit parvenu jusqu’à nous. On peut cependant s’en faire une idée générale à partir des illustrations contenues dans un livre de 1931 de Tominaga Kengo, le Shoryûha budôguzue(illustrations d’armures provenant de différentes traditions martiales) (voir illustrations 6, 7 & 8).

En regardant de près ces illustrations, on peut conjecturer que le men était en bambou et voir que celui‐ci ne possédait pas de protection de gorge, tsukidare. Le dô était fait de lamelles de bambou plates liées ensemble ; les kote couvraient complètement l’avantbras ; le shinai était un fukuroshinai. Si l’on compare ces illustrations avec l’illustration 5, l’armure de l’école Shinkage‐ryu, on remarque quelque différence : cette dernière ne possède pas de matelas couvrant le dessus de la tête ni de dô. Le bôgu dépeint dans les illustrations 6‐8 était probablement peu différent de celui développé par Naganuma Kunisato.
Perfectionnements
Sur la période s’étendant de 1751 à 1764, environ cinquante années après que le bôgu de Shinkage‐ryu fut achevé, Nakanishi Chuzo Tsugutake de l’école Ittô‐ryû participait à des « full contact » uchikomigeiko en utilisant un « men fait de métal et une armure en bambou ». Dans le Ittôryû heihô toho kigen (traité concernant Ittô‐ryû – édition de 1861) de Nakanishi Koresuke, il est dit que « le clan Nakanishi utilisa pour la première fois un shinai lors de ses entraînements pendant la période Horeki » (1751‐1764). Dans le Heihô michishirabe (édition de 1834) de Shirai Toru, il est fait référence de la façon dont Tsugutake, après la mort de son père, excella dans l’art du kenjutsu en se diversifiant et en expérimentant avec un shinai, plutôt que de se confiner dans des méthodes d’entraînement plus traditionnelles.
La raison pour laquelle Nakanishi Chuzo tsugutake pratiquait uchikomigeiko avec un shinai est notée dans un texte en réponse à une lettre de Yamaga Takayoshi de l’école Ittô‐ryû du clan Tsugaru dans le douzième mois de l’année 1775. La lettre posait à Nakanishi Tsugutake onze questions concernant le pour et le contre de la branche Nakanishi de la tradition Ittô‐ryû. Les réponses à ces questions sont clairement inscritesdans le Ittôryû gokui. Nakanishi était stimulé par l’intérêt que lui portait Yamaga et répondit aux questions, mais s’abstint de commenter la question sur l’utilisation du shinai avant le troisième jour du premier mois de l’année suivante. Yamaga avait posé à son mentor, Ono Tadao, maître de l’école Ono‐ha Ittô‐ryû, la même question vis‐à‐vis du combat avec un bokutô et du combat avec un shinai ; ce à quoi ce dernier répondit « s’entraîner avec un shinai est incroyablement clément, et n’est rien de plus que jeu pour enfant. Ce n’est rien de plus qu’une façon de se soustraire à la profondeur du combat réel ». En contraste avec cela, Nakanishi répliqua que c’était une complète incompréhension des objectifs du groupe de Nakanishi quant à l’emploi du shinai lors de l’entraînement. Ce contentieux à propos de l’utilisation du shinai lors de l’entraînement au combat, opposé à la pratique des kata, ne restera pas seulement une question importante au sein de l’école Ittô‐ryû, mais sera également furieusement débattu par de nombreuses autres traditions martiales. C’est à partir de là que nous assistons à un transition massive de la méthode d’entraînement traditionnelle par le biais des kata utilisant de vraies lames ou des bokutô vers celle de la pratique avec shinai, comme dans le kendo moderne.
Concernant les modifications du bôgu à partir de la fin du XVIIIe siècle, il existe une référence dans le Nisho gogo no ben de Zokukoken Koon (1794) qui décrit l’état de l’équipement à cette époque. « La soi‐disant armure n’est rien de plus que du coton ou du cuir assemblés avec du rembourrage puis cousu, et des pièces de bambou liées entreelles ». Dans le traité sur le kenjutsu de Yamazaki Toshihide, Kenjutsu giron (1791), il est dit : « il n’y a pas de meilleur façon de comprendre les principes du combat que de mettre un men et d’enfiler des kote, et de pratiquer les techniques avec un shinai, sans aucune inquiétude de se blesser ». De même, dans le Kenjutsu hiden doku Shugyo (1800) du même auteur, il est noté : « dans un premier temps, les pratiquants portent un men, des kote et une protection de corps en bambou, afin de ne pas s’exposer à des blessures […] » Ces passages indiquent que l’utilisation d’une armure d’entraînement était assez répandue à cette époque. L’armure dépeinte dans l’illustration 9 tirée d’un manga d’Hokusai (1808) est représentative du bôgu utilisé pendant cette période.
Par contre, après inspection, on remarquera une fois de plus qu’il n’y a pas de protection de gorge, comme c’était le cas avec le bôgu de Jikishinkage‐ryû montré dans les illustration 6, 7 et 8. Cela semble indiquer que les techniques de tsuki n’étaient pas employées, et que la base de l’entraînement tournait autour des frappes au kote et au men.

A propos des techniques de tsuki, il y a un document intéressant relatif à un certain Oishi Susumu du clan Yanagigawa qui, dans la période Tempo (1830‐1844), se servit d’un shinai particulièrement long mesurant 5 shaku 3 sun (environ 167cm) afin de battre à plates coutures un épéiste renommé d’Edo avec des tsuki et des coupes au dô. Il apparaît qu’Oishi n’était pas seulement le maître de sa propre école Oishi Shinkage‐ryû, mais possédait également une licence d’enseignant de l’école Oshima‐ryû Sôjutsu (techniques de lance). Il semble s’être servi des son habileté aux piques des techniques de lance pour prendre un avantage certain sur le point faible des bôgu de kenjutsu. Peut‐être en partie dû aux exploits d’Oishi, les shinai plus longs devinrent à la mode dans les années qui suivirent.
Aussi, comme dépeintes dans certaines images de bôgu de cette époque contenues dans le fameux livre de Takano Sasaburo, Kendo, de larges protections de gorge furent alors ajoutées au men dans le but de garder cette cible plutôt fragile (illustration 10).

Tout ce qui pouvait être populaire à Edo faisait son chemin vers les provinces, et les protections de gorge attachées au men ne furent plus une exception. Par exemple, ce set rudimentaire de bôgu fabriqué à la main dans un petit village en 1836 (illustration 11) est fait de bambou, mais possède une protection de gorge énorme.

Un autre set d’armure fut également trouvé dans le même village, mais celui‐ci possède une grille en métal sur le men au lieu d’une grille en bambou, ce qui laisse penser qu’il y avait une autre transition dans le style des armures à cette époque.
Comme nous l’avons vu, les modifications de la grille en métal, du tsukidare, du matelas au sommet de la tête et de la protection de poitrine sur le dô semble avoir été des adaptations pour le kenjutsu, copiées du bôgu utilisé en sôjutsu. A l’inverse, les kote étaient à l’origine une invention du kenjutsu qui fut incorporée à l’équipement porté en sôjutsu. Donc, les deux formes de tradition martiale utilisèrent et améliorèrent les innovations de l’autre jusqu’à ce que cela aboutisse à la forme familière utilisée de nos jours, où un bôgu standard de kendo consiste en un men complet avec tsukidare, kote, dô et tare. A cette époque, la forme de base était établie, et l’évolution du bôgu se dirigea vers une période de perfectionnement des éléments séparés.
Dans la ville animée d’Edo, les environs de Kajibashi, Atago et Shitayakanari kaido étaient pleins de magasins spécialisés dans la vente de bôgu et de shinai. Dans le Shokoku kaireki nichiroku de Muta Takaatsu (un carnet de voyage), il est fait mention de luimême commandant un dô en cuir dans une boutique de Nichikage‐chô au prix de 1 ryô. Nous pouvons également apprendre dans ce texte qu’un shinai coûtait la modique somme de 200 mon. Le coût moyen qu’avait à débourser alors un pratiquant de kenjutsu pour un shinai était, semble‐t‐il, quelque chose comme 200 ou 270 mon.
Près de l’endroit où nombre de ces magasins étaient concentrés se tenait le dojo de Jikishinkage‐ryû de Naganuma, ce qui en faisait en vérité une « place forte » du kenjutsu. De plus, la raison pour laquelle le Bakufu construisit l’académie militaire Kobusho dans ce quartier concernait la défense navale, à cause d’un accès proche à la mer, mais aussi parce que la zone grouillait d’experts en kenjutsu et l’équipement abondait.
Il y a une charmante image dans le Ehon azuma asobi (1802) de Katsushika Hokusai, qui dépeint ce qui ce passait dans l’un de ces magasins (illustration 12). D’un coup d’oeil, on peut voir des fukuroshinai, et du matériel de protection en bambou pendu aux murs de ce qui ressemble à un magasin d’armure traditionnelle. En ce basant sur cette image, on peut supposer que c’était principalement ces artisans (d’armure traditionnelle) qui s’occupaient également de l’équipement contemporain.
Le bôgu pendant le Bakumatsu.
Avec l’arrivée des bateaux noirs de Perry à Uraga, le Japon fut forcé d’ouvrir ses portes à l’Ouest, et il y eut une très forte augmentation des ventes d’armes et d’armures. Ces événements prirent le Bakufu par surprise qui décida précipitamment la construction d’une académie militaire nationale (la susmentionnée Kobusho) à Edo en 1855 afin d’encourager l’étude des bujutsu.
Le Kobusho fut responsable de l’unification des critères se rapportant au bôgu et au shinai utilisés dans la pratique du kenjutsu, qui, jusqu’alors, variaient d’une école à l’autre et d’un dojo à l’autre. Le Kobusho entreprit aussi de placer moins l’accent sur la pratique des kata que sur l’entraînement au shiai, et établit les règlements relatifs à la longueur des shinai, réduite à pas plus de 3 shaku 8 sun (environ 115 cm). Cela porta effectivement le kenjutsu à un autre niveau, détaché de toute école ou tradition particulière. L’accent sur le shiai entraina également un regain d’intérêt pour les matches inter écoles (taryûjiai), et des bôgu plus solides et plus transportables furent développés.
Alors que les jours du Bakufu allaient sur leur fin, le très répandu dô une pièce en cuir fut incorporé à un set d’armure facile à transporter. Dans le cas des armures en bambou, la zone de la poitrine jusque sous les hanches était en général droite et rigide, alors que le dô en cuir pouvait posséder une courbure s’ajustant aux lignes du corps. Aussi, avec l’armure en bambou, le dô et le tare étaient assemblés en une pièce unique et le tare consistait en trois rabats de protection. Mais, avec la version en cuir, le dô et le tare furent séparés, et le tare fut amélioré par l’ajout de deux rabats supplémentaires. Le men n’était pas différent de celui utilisé aujourd’hui, et possédait quarante barres métalliques horizontales protégeant le visage. Les barres horizontales et verticales étaient protubérantes et étaient suffisamment solides pour protéger des piques au visage. De plus, le matelas du men était à peu près de la même taille que la protection de gorge, ne protégeant qu’à peine les épaules et paraissait donc très court en comparaison des men actuels. La protection de gorge était quelque peu conséquente en largeur mais ne possédait pas la protection de secours à l’arrière comme les men modernes ont (illustration 13).

A cette époque, les dô étaient faits de bambou avec une couche de cuir protecteur tendu sur le devant. La partie principale du dô devint bombée, très similaire aux dô utilisés aujourd’hui (illustration 14).
Le bôgu après l’ère Meiji.
Avec le début de l’ère Meiji, les clans (han) furent dissouts et le kenjutsu se trouva sur le déclin. Ce qui sauva le kenjutsu de l’extinction, ce furent les spectacles mis en place pour amuser les foules et la création de dojos privés par des amateurs de kenjutsu autonomes.
Le gouvernement Meiji restructura son armée sur le modèle français comme je l’ai déjà mentionné. En 1884, les Japonais invitèrent le conseillé militaire français Kiehl de Villaret [voir plus haut] qui procéda à l’introduction des méthodes d’escrime française. Ce style de kenjutsu fut ensuite structuré et présenté dans le manuel cité en début d’article, le Kenjutsu kyohan. C’est la première fois que le terme bôgu était utilisé et il serapportait à l’armure de style français.
Cependant, le Japon vint à porter son intérêt militaire non plus sur le modèle français, mais sur le modèle allemand. Dans le manuel susmentionné, des amendements furent faits, dans lesquels il était stipulé que le bôgu de style japonais serait utilisé pour pratiquer le style d’escrime européen à une main. Même avec ces changements dans le système militaire, le bôgu traditionnel japonais continua a être utilisé et développé, et un nouveau dô, par exemple, fut produit en masse avec une protection supplémentaire pour le dessous des aisselles ; la courbure du dô fut encore plus accentuée.
Pendant l’ère Taishô (1912‐1926), la production en masse de bôgu continua, et les bôgu fabriqués à la machine firent leur apparition à côté de l’équipement traditionnel cousu main.
Durant la période Shôwa, les kote étaient découpés au sommet en haut du futon, et le matelas sur le men gagnait en longueur afin qu’il puisse éventuellement couvrir toute la surface des épaules. C’est à ce stage que l’on peut dire que l’évolution du bôgu est terminée.
A propos, si l’on en croit le catalogue d’un magasin en 1932, le bôgu le plus cher qu’ils avaient en vente valait 85 yens le set. Si l’on considère les éléments séparés, le men (distance entre les coutures, 1 bu 5 rin ; finition cuir, grille en métal) valait 26 yens, les kote 18 yens, le dô 24 yens et le tare 17 yens. Le set en bambou le moins cher coûtait 10,5 yens (10 yens et 50 sens). Un dô en cuir pouvait coûter dans les 20‐30 yens. Si l’on multiplie ces prix par 10000 pour avoir un équivalent actuel, le prix s’élèverait à 850000 yens (un peu plus de 6500 euros). Cela montre que le bôgu n’était absolument pas un article bon marché à cette époque. Un set d’armure était déjà considéré plus comme un objet d’art créé par de talentueux artisans que comme du simple matériel d’entraînement.
La veste de judo la plus chère en ces temps‐là valait 2,6 yens. Une veste bleue standard de kendo coûtait 2,9 yens, et une de qualité supérieure plus de 6 yens. Un shinai pour enfant valait 0,4 yens et les shinai de bonne qualité dans les 0,8‐0,9 yens. Ainsi, le prix du bôgu seul pouvait également être considéré comme un facteur faisant obstacle à la popularisation du kendo à cette époque.
La période de l’aprèsguerre.
Immédiatement après la guerre, la pratique des arts martiaux fut interdite. A la place du kendo, un nouveau sport appelé shinaikyôgi, combinant kendo et escrime européenne fut développé. L’équipement de protection utilisé dans cette escrime nouvellement concoctée était désigné comme :
‐ Men (masque), dôate (protection) et gants.
‐ Le masque sera fait d’un grillage de métal sur le devant et les côtés.
‐ La protection sera faite d’un épais matelas de coton et de solides plaques de métal ou bambou.
‐ Les gants auront une protection d’avant‐bras allongée garnie de plaques rigides.
On peut imaginer à partir de la description de l’équipement l’influence de l’escrime occidentale dans le design.
La All Japan Kendo Federation fut inaugurée en octobre 1952. Dans les règles concernant le shiai publiées en mars de l’année suivante, il est dit que « Le bôgu doit comprendre un men, des kote, un dô et un tare ». Ainsi, l’armure d’avant‐guerre était officiellement réintroduite et était visiblement différente de l’équipement récemment développé pour le shinaikyôgi. Il y eut une courte période où les deux styles furent pratiqués côte à côte, mais en mars 1954, la All Japan Kendo Federation et la All Japan Shinai‐kyôgi Federation furent combinées en une All Japan Kendo Federation globale, ce qui sonna essentiellement le glas du shinaikyôgi.
Par la suite, des choses telles que les dô en duralumin ou les kote à cinq doigts furent façonnées, mais aucun changement majeur n’est à mentionner dans le design du bôgu. Bien sûr, le shinai en carbone graphite fut mis en vente pour la première fois en 1985, et fut finalement autorisé pour en tournoi officiel le 18 mars 1987 et est toujours utilisé par de nombreuses personnes.
Un autre développement intéressant dans le monde du bôgu fut la production de men avec une protection de visage transparente en plexiglas, qui furent commercialisés en mars 1997. A cause de la popularité de ces men, la All Japan Kendo Federation se décida à accepter officiellement leur utilisation en compétition lors de la révision des règlements du 15 mars 2000 et cette décision fut appliquée le 1er avril 2000.
Le futur du bôgu (kendôgu).
Pour conclure cet article, je voudrais relier cet historique brièvement exposé avec quelques réflexions sur le futur du bôgu (kendôgu). La troisième période de l’histoire du bôgu a débuté, suivant les changements officiels de nom, dôgu puis bôgu et maintenant donc kendôgu. Ce nouvel âge est représenté par l’invention du shinai en carbone graphite et du men à champ visuel large en plexiglas, qui ont chacun changé l’image conventionnelle du bôgu. Je suspecte que les prochaines choses à changer seront les himo (les cordons) pour le men et pour le dô. Cela peut paraître surprenant, mais même les Japonais sont en train d’oublier comment attacher le men et le dô correctement. Je prévois que le men sera développé en utilisant des attaches en velcro, et le dô suivra probablement avec des matériaux similaires. Pourtant, l’artisanat traditionnel des fabricants de bôgu tombera dans l’oubli à mesure que la production deviendra simplifiée.
En ce qui concerne la question de la tradition et de la modernisation du kendo, un débat fait actuellement rage au Japon à propos de descendre en sonkyô avant de commencer et pour terminer les combats, quand les 2 kendôka se montrent déjà un respect mutuel dans l’exécution du salut debout. Est‐ce que ces 2 formes de courtoisies sont réellement nécessaires ? Cette tendance à débattre de la rationalité de certaines traditions du kendo provoquera très certainement la suppression de ces aspects jugés inutiles. Même si une action telle que le sonkyô a un sens, cela est ébranlé par la question de savoir si oui ou non c’est réellement nécessaire en shiai. Faire des poses de victoire ou des gestes de joie en levant les bras au ciel après avoir gagné un tournoi est toujours autant peu apprécié en kendo. C’est une chose que l’on peut voir souvent au judo ou au sumo, mais reste pour quelque raison considéré comme impardonnable dans cercles de kendo qui sont en comparaison plus conservateurs. Nous devons clarifier ce qui est pardonnable ou non dès l’instant ou cela concerne le progrès ou le changement afin d’éviter dans le futur des clashes nuisibles. Mon point étant que le problème du maintien d’une « prudente » balance entre popularisation et tradition est quelque chose que le monde du kendo doit prendre très au sérieux dès maintenant.
Nakamura Tamio
Translated from the original Japanese by Alex Bennett. Kendo
World would like to acknowledge Professor Nakamura and
Kendo Jidai Magazine (where the original was first published)
for kindly allowing us to use this article. All rights for this
article remain the property of the author, Nakamura Tamio.